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Page:Nordau - Dégénérescence, tome 1.djvu/74

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FIN DE SIÈCLE

quand l’apôtre d’un délire et sa suite parviennent à attirer sur eux une attention plus générale. Alors cet apôtre voit accourir à lui un tas de gens qui ne sont plus de bonne foi, qui savent très bien reconnaître le côté insensé du nouveau dogme, mais néanmoins l’acceptent, parce qu’ils espèrent gagner réputation et argent, comme membres de la nouvelle secte. Il y a dans chaque peuple dont l’art et la littérature sont développés, de nombreux eunuques intellectuels qui ne sont pas capables d’engendrer une œuvre vivante, mais arrivent très bien à imiter le geste de la procréation. Ces mutilés forment malheureusement la grande majorité des écrivains et des artistes de profession, et leur grouillante masse parasitaire étouffe trop souvent le talent vrai et spontané. Or, ce sont eux qui se hâtent de fournir l’escorte à chaque nouvelle tendance qui semble devenir à la mode. Ils sont naturellement toujours les plus modernes de tous, car nul commandement d’originalité, nulle conscience artistique ne les empêchent d’imiter constamment avec le môme zèle d’artisan, en le défigurant, le modèle le plus récent. Habiles à s’approprier les extériorités, plagiaires et pasticheurs déterminés, ils s’empressent autour de chaque manifestation originale, qu’elle soit maladive ou saine, et se mettent sans perdre de temps à en fabriquer des contrefaçons. Aujourd’hui ils sont symbolistes, comme ils étaient hier réalistes ou pornographes. Ils écrivent avec la même facilité des mystères, s’ils s’en promettent renom et bon débit, comme ils bâclaient des romans de chevalerie et de brigands, des récits d’aventures, des tragédies romaines et des idylles villageoises, quand la demande des cri-