donnons est grossière, a été faite avec une extrême précision par les physiciens au moyen de méthodes délicates qui importent peu ici. Le résultat a été semblable : la masse inerte et la masse pesante des corps sont exprimées rigoureusement par les mêmes nombres.
Newton n’avait vu là qu’une coïncidence. Einstein y a trouvé la clef du donjon hermétique et inviolé où la gravitation s’isolait du reste de la nature.
Voici comment :
Une chose est remarquable dans la pesanteur, dans la gravitation : quelle que soit la nature des objets, ils tombent tous avec la même vitesse (abstraction faite de la résistance de l’air). On le constate facilement en laissant tomber en même temps, dans un long tube où on a fait le vide, des objets les plus divers : ils parviennent tous en même temps au bas du tube.
Une tonne de plomb ou une feuille de papier lâchés ensemble du haut d’une tour dans le vide atteignent le sol simultanément, avec une vitesse dont l’accélération, est de 981 centimètres par seconde.
C’est un fait que Lucrèce connaissait déjà. Voici en effet ce qu’écrivait il y a deux mille ans l’immortel et profond poète :
… Nulli, de nulla parte, neque ullo
Tempore, inane potest vacuum subsistere rei,
Quin sua quod natura petit concedere pergat.
Omnia qua propter debent per inane quietum
Aeque ponderibus non æquis concita ferri[1].
- ↑ De Natura Rerum, liv. II, vers 235-240.