définie par Louis xiv en une parole mémorable : l’État, c’est moi — avait fait lentement son chemin à travers certains des règnes antérieurs, de même les germes du mouvement révolutionnaire doivent être recherchés dans un lointain passé. Les persistantes propositions des États Généraux, la tentative impatiente d’Étienne Marcel se relient de façon directe et suivie aux exigences formulées en 1789. En étudiant ces temps troublés, on est exposé à négliger des parties essentielles et à laisser l’attention se concentrer autour de certaines figures ou de certains événements dont le caractère accentué s’impose trop exclusivement. C’est ainsi que les débuts du règne de Louis xvi et les premiers temps du Consulat demeurent volontiers dans l’ombre, tandis que les journées dramatiques de la Terreur et les gloires éclatantes de l’Empire se trouvent en plein relief.
La période révolutionnaire dans son ensemble est au moins aussi militaire que politique. Ce qui la distingue, c’est d’abord l’ambition de créer un État modèle sur des données inédites et sans tenir grand compte du passé. C’est, ensuite, l’effort en vue d’extérioriser les idées d’émancipation. La guerre d’Amérique (1778-1783) qui commença dès les premières années du règne de Louis xvi participe déjà du caractère des guerres révolutionnaires et quand, en 1814, les Alliés entrant à Paris, déclarent qu’ils en veulent à Napoléon et non à la France, c’est bien contre l’empereur issu de la révolution qu’ils dirigent leur action. Ainsi une même caractéristique se maintient de 1774 à 1814 à travers l’histoire intérieure aussi bien qu’à travers l’histoire extérieure.