Page:Nouveau - Poésies d’Humilis et vers inédits, 1924.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Je vous adore, froid parfum des sacristies,
Chœur d’agate où le jour, sous un rideau sanglant,
Voit éclore, parmi la danse des hosties,
Le rêve violet d’un doux évêque blanc ;

Chapelle de soupirs, grilles, ombre jalouse
D’où la pensionnaire aux essors fabuleux
Reluque, avec le cœur d’une petite épouse.
Un séraphin charmant, pâle au fond des cieux bleus ;

Prises de voile, où la vierge, en des frissons vagues,
Sur l’autel, dont la marche a sacré ses genoux,
Ecoute sa toison, qui va fleurir en bagues,
Choir sous les ciseaux saints, terrifiants et doux.

Celle qu’avec le nard pudique d’un roi mage
J’encense dans mon cœur se meurt là ; j’ai pu voir
Ses yeux, lampes d’amour où brûle mon image.
Et je m’en suis allé, bien ivre… un certain soir !…

O toi qui vis dans ces solitudes de femme,
Et qui n’as dû garder de ton été premier
Qu’à peine assez de corps pour contenir une âme,
Colombe en route pour l’éternel colombier ;

Cieux choisis d’où l’on voit pleuvoir encor des mannes
Et descendre sur les fronts des langues de feu,
Ma bouche - en vous rêvant - faite aux argots profanes,
Bégaie une oraison : je me trompe avec Dieu.