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LE CORPS ET L’AME


Dieu fit suave et beau votre corps immortel
Les jambes sont les deux colonnes de ce temple,
Les genoux sont la chaise et le buste est l’autel.

Et la ligne du torse, à son sommet plus ample,
Comme aux flancs purs du vase antique rêve et court,
Dans l’ordre harmonieux dont la lyre est l’exemple.

Pendant qu’un hymne à Dieu, dans un battement court,
Comme au cœur de la lyre, une éternelle phrase
Chante aux cordes du cœur mélodieux et sourd.

Des épaules planant comme les bords du vase
La tête émerge, et c’est une adorable fleur
Noyée en une longue et lumineuse extase.

Si l’âme est un oiseau, le corps est l’oiseleur,
Le regard brûle au fond des yeux qui sont des lampes
Où chaque larme douce est l’huile de douleur.

La mesure du temps tinte aux cloisons des tempes
Et les bras longs aux mains montant au firmament
Ont charitablement la sûreté des rampes.

Le cœur embrase et fond dans leur embrassement
Comme sous les pressoirs fond le fruit de la vigne,
Et sur les bras croisés vit le recueillement.

Ni les béliers frisés ni les plumes de cygne
Ni la crinière en feu des crieurs de la faim
N’effacent ta splendeur, ô chevelure insigne !