Page:Nouvelle revue germanique, tome 14, 1833.djvu/348

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
346
PENSÉES TRADUITES

communes que le sont aujourd’hui des maximes de morale, et que l’esprit infatigable de l’humanité fût occupé de tout autres découvertes plus neuves et d’un ordre plus élevé.


Les sophistes sont des gens qui, toujours attentifs aux endroits faibles de la philosophie et aux défauts de l’art, cherchent à tourner ces défauts en faveur d’un but indigne et sans philosophie. Ils n’ont, à proprement parler, rien à faire avec la philosophie. Ils sont de leur nature inphilosophes (unphilosophisch)[1], et ils doivent être regardés et traités comme ennemis de la philosophie. La classe la plus dangereuse de ces hommes-là est celle des sceptiques devenus sceptiques seulement par haine pour la philosophie.


Les autres sceptiques méritent en partie d’être estimés. Ils ont un don véritable de distinctions philosophiques, et il leur manque la puissance de pensée. Ils ont bien une capacité de compétence, mais non pas une force incitante. Ils sentent les vices des systèmes connus, et aucun ne les vivifie. Ils ont un goût vrai, mais ils ne possèdent pas l’énergie d’une imagination productive. Ils doivent être livrés à la polémique. Tous les éclectiques sont sceptiques, et plus ils embrassent, plus ils sont sceptiques.


Le véritable acte philosophique est la mortification de soi-même (Selbsttödtung). C’est là le commencement réel de toute philosophie, c’est là que tendent tous les besoins du jeune homme qui aspire à être philosophe, c’est là ce qui répond à toutes les conditions, à tous les caractères d’un esprit transcendant.

  1. Qu’on me pardonne d’employer des mots encore inusités lorsqu’ils ne peuvent être remplacés par aucun autre synonyme, ou lorsqu’ils nécessiteraient l’usage d’une périphrase : il me semble que le meilleur est encore de faire violence à la pruderie de notre langue, et de lui donner d’abord par force ce dont elle finira bien par s’accommoder.
    X. M.