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à travers les ronces

coula à travers mon cœur et me fit crier à Dieu : Mon Père, mon Père.

Parole puissante qui fondit à l’instant tout ce que la tristesse avait amassé de froideurs et de défiances. Je pleurai longtemps, mais humblement, tendrement, comme on ferait dans les bras d’un père adoré contre lequel on aurait follement nourri bien des ressentiments, et qui loin de s’indigner des colères et des reproches les fondrait en regrets et en amour dans le plus étroit et le plus délicieux embrassement.

Puis, quand je fus dans ma chambre, ouvrant l’Évangile j’y lus : Parce que vous êtes enfants, Dieu a envoyé dans vos cœurs l’Esprit de son fils qui crie : Mon Père, mon Père.

Oh, que les troubles, que les défiances étaient loin ! Je restai plusieurs jours avec ce sentiment de soumission si profond et si tendre, et le souvenir m’en est resté – pour ma confusion peut-être — car je vais encore bien près du découragement et du murmure.


2 juillet. — Il me semble que ce qui perd la plupart de nous ce n’est pas le plaisir, mais le mauvais usage des peines. La nature répugne si invinciblement à la souffrance. C’est un feu que la passion du bonheur, un feu étrange qui s’attise surtout de toutes les souffrements, de toutes les douleurs.