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nouvelles soirées canadiennes

On peut ramasser bien d’autres miettes de bonheur à la campagne. J’aime les grèves ! Le murmure des flots captive mon oreille. L’ombrage des bosquets me fascine avec la mystérieuse solitude qui y séjourne ; la note suave que l’oiseau laisse tomber en passant me ravit et me remue.

Tous les jours après un bon déjeuner, je descends la falaise avec un livre de Victor Hugo ou de Lamartine. Je dois avouer que je ne suis pas encore assez poète, pour planer au-dessus de la prose d’un repas frugal ; je m’accommode facilement d’un bifteck avant de partir pour le pays des rêves.

Je les aime mes grèves de Lotbinière ! Comme elles sont belles avec leurs sables mouvants, leurs graviers que l’on dirait pailletés d’argent. J’y cours chaque jour, admirant l’intéressant phénomène de la marée qui couvre et abandonne successivement le rivage. Il y a çà et là de belles touffes d’arbrisseaux qui vous invitent à savourer une de ces sublimes prières dont Lamartine a si bien rempli ses méditations.

Rien ne vous empêche de graver sur l’écorce des arbres une date… un nom béni… tout un monde de souvenirs. Sur de petites pierres, je burine une lettre… deux lettres… trois lettres… et je les lance à la mer, où elles disparaissent en ricochant… Ne soyez pas surpris lecteur, si quelque vendredi, la pointe de votre