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FRAGMENTS

l’infini, sans jamais perdre une limite, c’est-à-dire la condition de la possibilité de sa vie. Toute vie est un surabondant phénomène de renouvellement qui n’a que d’un côté l’apparence d’une destruction. Le précipité de la vie est une chose vivante, susceptible de vie. Ce que la chaleur est à la flamme, l’esprit l’est à la vie.

Si nous avions une fantastique comme nous avons une logique, l’art de l’invention serait trouvé. À la fantastique appartient aussi, jusqu’à un certain points l’esthétique, comme la science de l’intelligence appartient à la logique.

L’éthique et la philosophie sont des arts. La première est l’art de choisir a priori, parmi les motifs d’agir, une idée morale, et d’ajouter ainsi un sens grand et profond à tous ses actes, de donner à la vie un sens supérieur, et d’ordonner et d’unifier de cette façon, artificiellement en un tout idéal, la masse des actes intérieurs et extérieurs. (Les actes intérieurs sont les sentiments et les résolutions.) La seconde est l’art d’agir de même avec les pensées, de choisir entre elles, l’art de produire l’ensemble de nos représentations selon une idée absolue et artificielle ; et de penser un système mondial a priori, hors des profondeurs de notre esprit ; d’employer activement l’organe de la pensée à la composition d’un monde intelligible. En tous les arts véritables est réalisé une idée, un esprit ; l’esprit mondial