Page:Novalis - Les Disciples à Saïs, 1914, trad. Maeterlinck.djvu/279

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
223
FRAGMENTS

et si joueuses ? Et le besoin plus grand d’assistance qu’elles éprouvent, les élève aussi au-dessus de nous, ainsi que leur habileté plus grande à se tirer d’affaire ; et le talent qu’elles ont bien plus que nous d’être despotes et esclaves. Et de la sorte, elles sont absolument au-dessus et au-dessous de nous, et en outre, plus homogènes et plus indivisibles que nous. Les aimerions-nous encore s’il n’en était pas ainsi ? Avec la femme est né l’amour et avec l’amour la femme, et c’est pourquoi on ne comprend pas l’un sans l’autre. À celui qui veut comprendre la femme sans l’amour et l’amour sans la femme, arrive ce qui arriva aux philosophes qui considéraient la passion sans l’objet, et l’objet sans la passion, et ne voyaient pas les deux choses dans l’action. Ce qui n’est pas encore à la portée des femmes n’est pas encore mûr. Elles sont là, comme les grands de Rome, non pour préparer, mais pour jouir des résultats, pour user des choses, non pour les tenter ou les éprouver. Être aimées est partie de leur essence originelle. La raison seule sépare les femmes et l’amour.

Manger en commun est l’acte symbolique de l’union. Toutes unions ou réunions, à l’exception du mariage, ont un but déterminé ; sont déterminées par un objet, et cet objet détermine leurs actes. Le mariage au contraire est une union totale, indépendante. Jouir, s’approprier, s’assimiler, c’est manger, ou plutôt, manger n’est autre chose qu’une appropriation. De là, toute jouis-