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a dans la nature des rapports d’un genre diamétralement opposé : des rapports d’alliance, des associations. Ces associations peuvent devenir tellement étroites que la vie d’un des associés ne peut pas durer un seul instant sans la vie de l’autre, si étroites que les naturalistes ont mis parfois des siècles à comprendre qu’il y avait des associés et non un individu. À proprement parler, tous les métazoaires sont des associations devenues si intimes que nous ne distinguons plus les unités constituantes.

Or, on n’est pas en droit d’identifier les rapports qui s’établissent entre unités naturellement antagonistes avec les rapports qui s’établissent entre unités naturellement associables. Spencer n’ignore certainement pas que l’homme s’associe à ses semblables de temps immémorial. Après avoir parlé des rapports qui règnent entre dévoreurs et dévorés, entre individus d’espèces différentes, lorsqu’il dit : « de même dans les sociétés », il compare des faits qui ne sont pas comparables ; donc, sa comparaison est complètement fausse. Et ce n’est pas assez dire des « faits non comparables », il faut dire des faits diamétralement opposés, car l’antagonisme vital est justement l’opposé de l’association vitale. Aucune des conclusions qu’on peut tirer des rapports entre êtres naturellement ennemis ne peut s’appliquer aux rapports entre êtres naturellement associables. Et si la lutte acharnée entre les premiers était véritablement la cause de leur perfectionnement, il ne s’ensuivrait en aucune façon que la lutte acharnée entre les seconds produisît le même résultat. Elle pourrait très bien avoir un effet autre, et même diamétralement opposé, parce que les rapports entre êtres associables sont autres que les rapports entre êtres non associables et y sont même opposés.

Si Spencer avait voulu comparer les luttes animales aux luttes humaines, il aurait dû comparer les luttes entre hommes aux luttes entre animaux de même espèce. Le combat entre un tigre et un taureau n’est pas assimilable