Page:O'Followell - Le corset, 1905.djvu/106

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

106

Dans l’audace même du nu, écrit de Goncourt, il y a des audaces : un décadi soir de l’an V (1796-1797) deux femmes se promènent aux Champs-Elysées, nues, dans un fourreau de gaze ; une autre s’y montre les seins entièrement découverts. À cet excès d’impudicité plastique, les huées éclatent ; on reconduit dans les brocards et les apostrophes mérités, jusqu’à leurs voitures, ces Grecques en costume de statues. » Leroy a fixé cette scène sur la toile et ce tableau qui a figuré au Salon de 1875 a été offert au musée de Nantes par le docteur Gosset.

Quicherat pense que ces deux audacieuses exhibitionnistes étaient Mme Hamelin, femme de l’officier de marine bien connu et une de ses amies.

Se rappelant peut-être que les Grecques et les Romaines ont porté longtemps des cyclœ transparentes, des laco-nicœ que Varron appelle vitreas togas, des robes de verre, la marquise de Créqui écrivait parlant des femmes du Directoire : Figurez-vous que toutes ces Grecques de la rue Vivienne n’étaient vêtues que d’une chemise de percale et d’une robe de mousseline sans manches avec toute la gorge et les épaules au grand air. Cette robe à l’antique et sans ampleur était serrée sur la taille immédiatement au-dessous de la poitrine avec un galon de laine rouge… Les jambes étaient toutes nues… Quant aux poches il n’y fallait pas songer avec un pareil vêtement qui n’était composé que d’une mousseline collée sur les flancs.

La grécomanie était donc à l’ordre du jour, on délibérait sur le costume à la sauvage de Mme Tallien et sur la tunique de gaze de Mme Hamelin.

Le corset devint une superfluité comme l’indique la chanson de Despreaux sur les modes du Directoire (Dr Witkowski) :

Grâce à la mode
On n’a plus d’corset (bis).
Ah ! qu’ c’est commode,
On n’a plus d’corset
C’est plus tôt fait !
Grâce à la mode
On n’a rien d’caché (bis}.
Ah ! qu’c'est commode !
J’en suis fâché !
Grâce à la mode
Un’ chemise suffit (bis')
Ah ! qu’c'est commode !
Un’ chemise suffit
C’est tout profit !

Cette disparition n’était pas absolue, c’est ainsi que d’après une estampe « Les Héroïnes d’aujourd’hui », où sont représentées deux merveilleuses, je puis montrer ce qu’était le corset à l’époque du Directoire.