men ne tarde pas à glisser sous la pression de ses tenailles, comme vous échappe un noyau pressé entre deux doigts.
C’est que pour devenir réellement abdominal, le corset ne doit plus être droit. Il faut que sa partie antérieure et inférieure soit légèrement incurvée dans le seins de la courbe naturelle anatomique du ventre ; qu’il moule, reçoive et soutienne le ventre de bas en haut. Alors, seulement le corset pourra se recommander de l’hygiène et de l’esthétique. Alors seulement, il méritera l’étiquette élogieuse d’écrin féminin, parce qu’il n’abîmera pas et n’écrasera pas les perles qu’il renferme.
Lisez aussi dans la Vie Parisienne sous la signature « Le Renard Noir » les récriminations, plaisantes dans la forme, mais si justes dans le fond, d’une femme qui, devant une amie, maudit les corsets droits. Elle est allée les considérer dans leur appartement, là, dit-elle derrière des paravents, maintes femmes s’ébrouent tant qu’elles sont en chemise, puis on apporte l’instrument de supplice, tous lacets ouverts, on vous pose cela autour des hanches, puis on vous le descend ma foi, jusqu’aux genoux ; ah ! je te promets bien que tout ce qui doit rester caché ne peut guère faire autrement ! Puis on attache, très serrés quelques paires de cordons aux bas ; enfin l’essayeuse plonge ses mains, faisant office de louches, entre le corset et le corps et ramène tout ce qu’elle peut trouver de chair au-dessus de l’armure ; on l’y soutient et on lace en faisant montre de toute la force dont on est dépositaire. La femme ainsi fagotée, certainement n’a plus de ventre, tout au moins à la place que lui assigne le Créateur, on a capté ce ventre, mais pour le placer, débordant entre l’estomac et le cœur. Elle n’a plus de jambes non plus la pauvre dame, plus d’espace entre la taille et les hanches, on dirait qu’elle veut avec sa bosse servir d’affiche-réclame pour le journal anglais The Punch… C’est la mode ou plutôt c’était la mode, on en revient…
Le corset droit appelé encore corset pelvi-thoracique a réalisé cependant et très certainement un grand progrès sur l’ancien corset cambré ou sus-omibilical, puisqu’il ne permet pas à la femme de se serrer autant la taille ; malheureusement, il ne s’est pas contenté de contenir l’hypogastre, il l’a écrasé par son buse droit et rigide.
Les corsets de la troisième catégorie ou corsets abdominaux doivent-ils être préférés aux corsets des deux précédentes catégories, de suite, je réponds oui, leur mode d’action doit, en principe, être préféré.