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ROMANS DE MŒURS ET ROMANS SOCIAUX

êtres réels et vivants. C’est un défaut d’éclairage qui en est un d’importance.

On peut faire un reproche sensiblement analogue à une autre Québécoise, Simone Buissière, qui avait en main la substance d’un grand, d’un très grand roman, mais qui a tout gâté par un souci de débutant de régler le sort de tous ses personnages y compris la punition des mauvais, de tous ceux qui ont voulu troubler l’ordre social, afin que la justice divine soit satisfaite dès ce bas monde. C’est une aberration, un défaut d’optique, une ignorance complète des contingences et conjonctures humaines que d’asseoir un roman sur de telles données irréelles. Il est faux que le vice soit toujours puni et la vertu récompensée sur la terre ; c’est même plutôt l’inverse qui se produit le plus souvent. Dieu a la vie éternelle pour manifester Sa justice. Les écrivains catholiques, véritablement imbus et pénétrés d’une saine doctrine, le savent et ne s’embarrassent pas de ces considérations puritaines qui emprisonnent notre catholicisme dans un conventionalisme qui en masque le visage auguste. Madame Buissière est victime du concept négatif du christianisme tel qu’il est enseigné dans trop de nos couvents et collèges. Que n’a-t-elle lu les romans de Graham Greene, les romans de Mauriac et aussi ceux de Barbey d’Aurevilly, le