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LES ROMANCIERS INTELLECTUELS

gueil et Dieu. Il analyse lui-même son état d’âme, il se dissèque à l’égal de l’étudiant sur le cadavre dont il veut connaître les secrets morphologiques. Et c’est avec une lucidité parfaite qu’il le voit. Drame de l’âme sans doute, mais aussi drame de l’esprit. Le péché qui menace le Frère Bernard en est un à l’étage supérieur ; il s’efforcera donc de réaliser la transcendance de son être dans les régions les plus élevées, les régions sublimes de la grâce.

C’est parce qu’il sait trouver le point de résultante de son orgueil légitime d’homme et du renoncement qu’exige Dieu qu’il sera sauvé et que la Grâce ne lui fera pas défaut : « Ce qui est insensé aux yeux du monde, Dieu le choisit pour confondre les sages ; et ce qui est faible aux yeux du monde, Dieu le choisit pour confondre les forts ». Le Frère Bernard a été choisi, il est au rang des « élus que vous êtes » et il y demeurera.

Mais ce n’est pas tout. Ces élus sont des hommes vivant au milieu d’autres hommes, c’est-à-dire des êtres remplis de défauts et d’imperfections ; cet aspect du livre de Clément Lockquell, recréant la vie communautaire avec sa grandeur et ses mesquineries, ses amitiés et ses antipathies, ses élans et ses refoulements, n’en est pas le moins intéressant, bien au contraire. Ici le romancier n’a eu