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IV


Bien qu’il me connût, évidemment, jusque dans mes tares les mieux cachées, je suis sûr que Dingo m’aimait beaucoup. Il m’aimait noblement, sans lécheries, sans traîtrises et jamais je n’ai senti, dans l’expression de sa tendresse toujours un peu fière, une diminution, un oubli de sa personnalité. Il m’aimait, homme, comme j’eusse souhaité que m’aimassent, chiens, bien des amis. Hélas ! j’ai eu dans ma vie assez d’amis, d’excellents, fidèles et très chers amis, pour savoir que l’amitié humaine n’est le plus souvent que la culture d’une domination ou l’exploitation usuraire d’un intérêt, d’une candeur, d’une confiance.

Il me semble qu’il était reconnaissant de mes efforts, même de mes maladresses à le comprendre. Je crois — l’ai-je cru vraiment ? — qu’il ne me jugeait point que sur les résultats parfois médiocres, rarement heureux, de ma conduite