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fait sauter en l’air et l’assomme, si Dingo ne l’a pas tuée d’un coup de dent. Il vend un sou la peau au chiffonnier de Cortoise et mange la viande dont il prétend que « c’est régalant, avec des petits oignons. » Il mange d’ailleurs bien d’autres choses qu’on n’a pas coutume de manger, chez les bourgeois « qui ne savent pas ce qui est bon », les rats « que c’est un délice », les hérissons « que c’est comme du veau », les couleuvres « que c’est comme du dinde », les belettes « qu’on dirait du canard. » Ces aubaines sont rares… La plupart du temps, il ne mange pas à sa faim. Il est vrai que souvent il boit plus qu’à sa soif.

Piscot plaît beaucoup à Dingo. De tous les habitants de Ponteilles, Piscot est le seul bipède avec qui Dingo entretienne un commerce d’amitié. À cause des taupes, je suppose… peut-être aussi à cause de son incurable misère… Quand Piscot est chez moi, Dingo ne le quitte pas, s’empresse autour de lui, lui parle sans cesse.

— Prends donc ton louchet… et allons faire sauter les taupes…, semble-t-il lui dire.

Il l’aide encore à toutes sortes de choses… Par exemple, il l’aide à pousser la brouette, de la même façon idéale et généreuse qu’il aida le vieux petit chemineau à tirer la voiture, chargée de meubles, sur la route.

La première fois qu’il vint au jardin, Piscot