Page:Octave Mirbeau - Dingo - Fasquelle 1913.djvu/217

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vient gambader devant le cheval et l’âne et les excite de ses aboiements, comme si les mouches qui les couvrent, qui les piquent et tourbillonnent sans cesse à leurs oreilles ne suffisaient pas amplement à cette besogne. Couronnant l’équipage, une bande de calicot répète en lettres rouges, l’enseigne du magasin de Montbiron : Au Progrès. À demi couché sur une banquette basse qui avance sur les brancards, Toutlemal, les guides lâches en main, dort ou lit le journal. Et ils vont ainsi, le cheval, l’âne, l’homme et le chien, à travers la région, de villages en hameaux, de foires en marchés, éblouir les femmes de leurs belles marchandises : étoffes de laine, coupons de soie, dentelles, fichus à fleurs, châles et manteaux qui, de chaque côté, à l’arrière de la voiture, sur des cordes tendues se balancent joliment aux cahots du chemin. Dans les centres importants, Toutlemal a soin de faire annoncer ses passages sensationnels par le tambour de ville.

Justement à cette époque, Piscot est tambour de ville de Ponteilles. Par six fois, il a tambouriné pour le compte du marchand de nouveautés et à raison de dix sous par fois. S’il ne sait pas lire, Piscot connaît assez d’arithmétique pour établir son compte.

Il se dit :

— Je dois neuf francs au marchand de nou-