Page:Octave Mirbeau - La 628-E8 - Fasquelle 1907.djvu/28

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qui doit me guérir de toute vaine agitation… Enfin… enfin… me revoici à Amsterdam… Je suis content… Décidément, huit jours, quinze jours… ce n’est pas assez… Je resterai trois semaines.

Je dis à mon mécanicien :

— Brossette, mon ami… nous resterons un mois ici… Peut-être plus.

Brossette sourit et répond :

— Entendu, monsieur… Alors, faut descendre les bagages ?… Tous ?

— Tous, tous, tous… Je crois bien…

— Entendu, monsieur…

— Et vous, mon bon Brossette… congé… Je n’ai pas besoin de la voiture ici…

Le sourire de Brossette s’accentue…

— Bon !… bon !… fait-il… En tout cas, j’attendrai monsieur, ce soir, pour les ordres.

— Mais non, mais non… Couchez-vous… Amusez-vous…

Et il se rend au garage.

À peine sorti de la voiture, la douche prise, le corps, des pieds à la tête, frotté à l’essence de sauge et de romarin, souple, gai, le jarret solide, je vais par la ville… Lentement, d’abord… en bon promeneur qui veut jouir des choses qu’il retrouve, qu’il aime… Ah ! quelle ville !… Quelle joie !… Quelle tranquillité en moi !… Pour la cent-millième fois, avec des phrases que je connais et que vous connaissez si bien, je bénis l’invention de l’automobile et ses incomparables bienfaits… Je me dis :

— Quelle merveille ! On part quand on veut. On s’arrête où l’on veut. Plus de ces horaires tyranniques, qui vous arrachent du lit trop tôt, qui vous font arriver à des heures stupides de la nuit, dans des gares