Page:Octave Mirbeau - La 628-E8 - Fasquelle 1907.djvu/89

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 Edmond Picard se mit à rire, à se tordre de rire. À plusieurs reprises, il applaudit frénétiquement.

Le soir, il a dit à son avocat, qui lui reprochait sa conduite inconvenante :

— Je ne croyais pas que c’était vrai… Je m’imaginais qu’on m’avait amené au théâtre, pour me distraire un peu, et me faire voir les meilleurs comiques de l’endroit. J’étais content… Je m’amusais… Ah ! je m’amusais !… Que voulez-vous ? J’aime les imitations…

Et il a ajouté, déçu :

— Alors, c’est pas imité ?… Ce juge, c’était bien un juge ?… Et vous, vous êtes bien un avocat ?… Et moi, je suis bien un assassin ?… Ah vrai !…



Le repas des funérailles.


Il m’a bien fallu aller à l’enterrement de Mme Hoockenbeck, la femme de mon ami Hoockenbeck. Il me savait à Bruxelles. D’ailleurs, un enterrement belge, je n’y eusse point manqué pour un empire.

Mon ami Hoockenbeck, commerçant réputé, — il a brillamment réussi dans ses affaires, — homme politique important — il est député, — protecteur des arts — il est de toutes les sociétés artistiques qu’invente et préside M. Octave Maus, — mon ami Hoockenbeck est bien le type de ces pauvres diables dont on dit qu’ils « n’existent pas ». Et si mon ami Hoockenbeck « n’existe pas » à Bruxelles, je vous laisse à imaginer… Hoockenbeck n’a jamais eu une opinion, ni un goût, ni une habitude, ni même une manie capable de résister, plus de cinq minutes, à une autre qu’on lui ait, je ne dis pas opposée, mais proposée. Rien de plus facile que de le