Page:Octave Mirbeau Un gentilhomme 1920.djvu/168

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anciennes ignominies. Il répondit en faisant des gestes de protestations :

— Vous savez bien… Voyons, monsieur le marquis… Une calomnie… Une bêtise !…

— Oui. Oui. Va toujours !… Je ne te connais pas, peut-être ?… Mais, dis-moi… ils m’appartiennent, ces albums… puisque je t’ai acheté toute ta boutique… Tu me voles !…

Moitié rieur, moitié furieux et très humble, il bredouillait :

— Voyons… voyons… monsieur le marquis… Je vous assure… je vous jure…

Et, se démenant sur sa chaise, il nous lançait des jets de salive à la figure… et, de temps en temps, il détournait sur moi un petit regard fourbe qu’animait une haine aiguë et profonde… On oublie facilement ses vilenies devant celles des autres… Il me dégoûta.

— Qu’est-ce que vous voulez ? me disait le marquis… Il en faut comme ça… On ne fait pas vider les fosses d’aisances par des poètes lyriques…

La veille et l’avant-veille de notre départ, nous ne bougeâmes pas de Sonneville. Je mis au net quelques notes, classai quelques documents indispensables que je devais emporter. Toujours sur les routes et dans les marchés, je n’avais guère eu le temps de me familiariser avec le château et d’en connaître les dépendances et les