Page:Octave Mirbeau Un gentilhomme 1920.djvu/78

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Il appuya son doigt sur le bouton d’un timbre, et il disparut derrière une portière…

Le cœur me battait avec force dans la poitrine à ce moment… De nouveau je perdis mon assurance. Et puis la réception de ce domestique, ma malle laissée à la porte… mon manque d’autorité… tout cela m’irritait au plus haut point… Je voulus réagir contre ces divers sentiments dont je comprenais, à cette heure décisive surtout, l’impardonnable faiblesse, et je tâchai de m’intéresser à tout ce qui m’entourait.

Les murs du vestibule étaient tout entiers revêtus de boiseries modernes, joliment exécutées sur des modèles du siècle dernier… Deux tapisseries extrêmement belles, représentant, l’une, un sujet galant, l’autre, un motif de chasse, s’encadraient dans les propres moulures des boiseries… Six portes anciennes en noyer sculpté, avec de délicats et discrets rehauts d’or, étaient surmontées d’importants trumeaux, ceux-ci, ovales, ceux-là, carrés, figurant des fleurs, des fruits, des poissons dans des corbeilles enrubannées, des amoncellements de gibier mort… Les meubles… les sièges… divers bibelots, encore recouverts de leurs housses, et quelques autres détails où le désordre s’attestait, disaient que les maîtres n’étaient là qu’en passant… Sur les dalles de mosaïque effacée et de ton très doux, à peine bleu, à peine jaune, étaient jetés des tapis persans d’une curieuse et admirable har-