Page:Octave Mirbeau Un gentilhomme 1920.djvu/87

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Rousseau est une sale crapule, et qu’il s’entend avec les braconniers… Vous… un garde… pourvu qu’il aille à la messe et qu’il fasse ses Pâques… cela vous suffit… Il peut me voler mon gibier et dévaster mes bois… l’absolution !… Eh bien ! vous allez lui donner son compte, à l’instant, vous entendez… et installer à sa place Victor Flamant…

La voix de M. Lerible s’effraya :

— Victor Flamant !… Monsieur le marquis n’y songe pas ?

— Comment, je n’y songe pas ?… Vous plaisantez ?… J’y songe si bien que ce sera chose faite demain, je le veux…

À l’effroi, M. Lerible joignit la prière :

— Je prie… je supplie monsieur le marquis de réfléchir… Monsieur le marquis sait que Victor Flamant est un homme des plus dangereux… qu’il sort de prison… qu’il est méprisé, redouté de tout le pays…

— Précisément…

— Monsieur le marquis n’a-t-il jamais pensé que c’est peut-être ce Flamant… qui panneaute les cerfs et les chevreuils de monsieur le marquis ?

— Raison de plus…

Je crus voir se ratatiner davantage et s’effarer jusqu’à la plus folle terreur le visage de M. Lerible… Pourtant, d’un ton convaincu, plus ferme, parce qu’il comportait un argument invincible, il dit :

— Mais, monsieur le marquis, jamais le tri-