Page:Oeuvres complètes de Jacques-Henri-Bernardin de Saint-Pierre, Tome 10, 1820.djvu/294

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résultat de toute estime publique, nous trouverons que Voltaire a achevé d'abattre le jansénisme en France, et que les auto-da-fé, contre lesquels il a tant crié, sont plus rares en Portugal ; qu'il a affaibli dans toute l'Europe l'esprit de fanatisme ; mais que d'un autre côté, il y a substitué celui d'irréligion. Suivant Plutarque, la superstition est plus à craindre que l'athéisme même : cela pouvait être vrai chez les Grecs ; mais nous à qui notre misérable éducation inspire dès l'enfance l'intolérance sous le nom d'émulation, nous nous occupons toute la vie à faire adopter nos opinions, ou à détruire celles qui nous embarrassent, quand nous n'avons pas assez de crédit pour faire passer les nôtres. L'intolérance théologique n'est qu'une branche de l'intolérance, disait J.-J. Rousseau ; chez nous le froid athée serait persécuteur. Au reste, ce n'est pas que l'esprit d'incrédulité soit universel dans Voltaire ; on y trouve au contraire de superbes tableaux de la religion et de ses ministres : il détruit souvent d'une main ce qu'il élève de l'autre ; ce qui est chez lui non une inconséquence, mais une vanité