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ment dévoués aux dieux infernaux. Le patriotisme s’étend chaque jour dans la progression accélérée d’un grand incendie. La jeunesse s’enflamme, les vieillards, pour la première fois, ne regrettent plus le temps passé ; ils en rougissent. Enfin, on se lie par des serments et on s’engage à mourir pour la patrie.

Les aristocrates, les vampires de l’État espèrent dans les troupes, et j’en ai entendu se vanter publiquement que les soldats se baigneraient dans notre sang avec plaisir. Non, chers concitoyens, non, les soldats n’assassineront pas avec plaisir leurs frères, leurs amis, des Français qui combattent pour les élever, eux soldats, aux grades militaires, pour rendre à la profession des armes sa noblesse originelle, pour que ce ne soit point un métier plus infâme que celui des bourreaux ; car les bourreaux ne versent de sang que celui que demandent les rois, et nos soldats étaient prêts à verser tout le sang dont le despotisme a soif. Non, ces soldats esclaves de huit ans, héros plus avilis que nos laquais et soumis aux coups de bâton, punis par les galères d’une désertion qui, dans la paix, ne peut jamais être un crime, et peut quelquefois être un devoir, et qu’en temps de guerre même on ne doit punir que par l’infamie, et comme Rome châtia ceux qui avaient fui à Cannes ; ces soldats que nous voulons af-