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n’est donc ni dans le droit, ni par le fait, une conséquence du principe établi.

Venons à l’autre conséquence, la possibilité d’une loi regia.

Si par cette loi on entend le pouvoir arbitraire, bien certainement un pareil droit ne peut jamais être constitutionnel. Qui dit constitution, dit forme de gouvernement fondé en droit : et le gouvernement despotique ne peut l’être. Il est bien évident que le souverain ne peut avoir que la puissance qui appartenait à la société, et la société n’a pu lui donner un droit qu’elle n’avait pas elle-même. Le pouvoir d’envoyer le cordon ne peut jamais appartenir ni au prince, ni au sénat, ni au peuple. Jamais la pluralité ne peut lier un citoyen à se laisser étrangler sans forme de procès[1].

Il faudra bien céder aux muets comme il faut céder au pistolet d’un brigand. Mais si

  1. J’excepte ceux qui sont pris les armes à la main. Fait-on le procès à une armée ennemie ? Seulement il y a cette distinction. Dans une guerre de nation à nation, le droit de tuer l’ennemi cesse dès qu’il a mis bas les armes, parce qu’il n’est pas coupable de les porter ; mais dans une guerre de conjurés contre une nation, dans l’armée de Catilina, par exemple, ou dans celle de Broglie, quoiqu’ils soient vaincus et qu’ils fuient, leur crime subsiste, et ils restent sous le cimeterre des vainqueurs, à qui il appartient incontestablement de frapper ou de faire grâce, sans qu’il soit besoin de faire le procès.
    (Note de Desmoulins.)