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fête anniversaire, était mille fois moins constatée, et vous n’avez échappé au meurtre que par votre courage, parce que les scélérats, les traîtres sont toujours lâches, qu’ils ne sont animés que par l’égoïsme et le vil intérêt, et que d’une passion basse il ne peut naître de grandes choses ; au lieu que le patriotisme, c’est-à-dire l’amour de ses frères et l’oubli de soi-même, enfante des actions héroïques, vous n’avez échappé enfin à ce péril que parce que l’ange tutélaire des bords de la Seine a visiblement veillé sur vous, et que, comme le disait Benoît XIV, la France est le royaume de la Providence.

Puisque la trahison est avérée, pourquoi s’enquérir si peu des traîtres ? Je le dirai avec la modération qui sied à une Lanterne, mais aussi avec la franchise qui convient dans un pays libre, et remplissant le rôle de vigilance qu’on doit attendre de mon ministère et de l’œil du grand justicier de France, nous tenons Besenval, d’Esprémenil, Maury, le duc de Guiche ; tant mieux s’ils se trouvent innocents ! Mais je n’aime point qu’on ait relâché Cazalès[1]. Sa personne est sacrée, dit-on. Je n’entends point ce mot-là. Veut-on dire du sieur Cazalès comme la loi romaine, c’est-à-dire le flatteur Ulpien, le disait du prince : Il est au-dessus des lois. Legibus solutus est.

  1. Voir Appendice, no II.