Page:Oeuvres de Camille Desmoulins - Tome 1.djvu/37

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ter ; je ne parle pas des énergumènes de toute nuance, qui, par l'imprévu de leurs violences, savaient piquer la curiosité publique : mais les Révolutions de Paris, rédigées par Loustalot avec une gravité éloquente, privées néanmoins de cette couleur fortement littéraire du journal de Desmoulins, comptèrent jusqu'à deux cent mille lecteurs 1 . En effet, pour apprécier Loustalot, il suffisait d'être patriote, de savoir lire et d'avoir du bon sens ; ces conditions ne suffisent pas pour goûter Desmoulins. Et, pour n'indiquer qu'un des côtés de son talent, qui ne pouvait être saisi par tout le monde, voyez ces continuelles allusions à l'histoire ancienne et moderne, et ces citations latines si fréquentes de Cicéron et de Tacite, ses deux grandes admirations. Sans doute il les traduit le plus souvent, et, avec un rare bonheur ; il donne à ses traductions le langage de 90 ; il distribue plaisamment les personnages de l'antiquité

  • Desmoulins se vante quelque part d'avoir déjà deux bataillons d'abonnés ; quel que soit le chiffre qu'indique eette eipression un peu vague, cela est bien loin du succès des Révolutions de Paris. Ajoutons qu'il est impossible de surprendre dans son journal le moindre signe de jalousie contre ses confrères. Le journalisme alors était chose sérieuse, œuvre de conviction, d'ambition, si l'on veut, mais non d'intérêt : on ne se querellait guère, entre journaux, que quand il y avait différence réelle d'opinion, et non rivalité de commerce. — C'est Camille Desmoulins qui prononça aux Jacobins l'éloge funèbre de Loustalot (voir cet éloge, Révoluti*r*s dr, France et de Brabant, n° 45).