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tion, pour sauver un mauvais citoyen que nous avions arrêté par ordre du comité de sûreté générale, comme prévenu de correspondance intime avec des conspirateurs, et pour avoir donné asile chez lui au traître Nantouillet. »

Vous allez juger, frères et amis, quel était ce scélérat que j’ai voulu sauver. Le citoyen Vaillant était accusé, de quoi ? vous ne le devineriez jamais : d’avoir donné à dîner, dans sa campagne, à deux lieues de Péronne, à un citoyen résidant dans cette ville depuis quinze mois, y montant sa garde, y touchant ses rentes ; en un mot, ayant une possession d’état, et de l’avoir invité à coucher chez lui. N’est-ce pas là le crime ridicule dont parle Tacite ? Crime de contre-révolution de ce que votre fermier avait donné à coucher à un ami de Séjan. Que dis-je ? les amis de Séjan ayant été mis hors la loi, Tacite pouvait avoir tort de se récrier. Mais ici c’est bien pis ! Vaillant avait donné, il y avait plus d’un an, l’hospitalité, deux jours seulement, à un citoyen alors actif, à un citoyen qui, dans ce temps-là, n’était pas sur la liste des gens suspects. Il est vrai que ce citoyen s’appelle Nantouillet ; il est vrai que ce Nantouillet étant venu voir, en 1791 ou 1792, ce Vaillant qui, par parenthèse, est un mien cousin, celui-ci ne l’a point mis à la porte, quoiqu’il fût un ci-devant. Mais, bon Dieu ! sera-t-on un scélérat,