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Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome I, trad Defauconpret, 1830.djvu/122

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LE LAI DU DERNIER MENESTREL

xxii.

Lorsque l’énorme pierre recouvrit la tombe, les ténèbres redoublèrent ; car la lune avait disparu, et les étoiles scintillaient en petit nombre. Le prêtre et le chevalier se retirèrent d’un pas chancelant et l’esprit égaré, ayant à peine la force de regagner la porte. On dit qu’en traversant les ailes de l’église, ils entendirent dans l’air des bruits étranges, et que des galeries qui régnaient le long des murs il partit de profonds gémissemens, de bruyans éclats de rire, ou des sons qui ne ressemblaient pas à la voix humaine, comme si les démons eussent célébré une fête, parce que le livre magique revoyait le jour. Je ne puis dire si ces détails sont vrais : je conte l’histoire comme je l’ai apprise.

xxiii.

— Maintenant, retire-toi, dit le moine ; et, lorsque nous serons sur notre lit de mort, oh ! puisse Notre-Dame et le secourable saint Jean obtenir pour nos âmes le pardon de ce que nous venons de faire ! — Le Père retourna dans sa cellule pour s’y livrer à la prière et à la pénitence ; mais, quand la cloche du couvent sonna midi, le moine de Sainte-Marie n’existait plus. Son corps était étendu devant la croix, les mains jointes, comme s’il priait encore.

xxiv.

La fraîcheur de l’air du matin rendit plus libre la respiration du chevalier, et il s’efforça de retrouver son courage. Il se sentit soulagé quand il fut au-delà des monumens funèbres qui entourent les murs de l’abbaye ; car le livre mystérieux accablait son sein comme d’un poids énorme, et ses membres si robustes tremblaient comme les feuilles du saule agitées par le vent. Il vit avec plaisir les premiers feux de l’aurore éclairer la cime du mont Cheviot ; le retour de la lumière réjouit son cœur, et il récita un Ave, Maria, aussi bien qu’il le put.