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LA VEILLE

À l’heure solitaire de minuit, alors que les esprits malfaisans voltigent dans les airs, j’irai auprès de toi. Il a dit et a disparu. Ma maîtresse est demeurée seule, et je n’ai rien vu de plus.

Le front sombre du baron s’enflamme et rougit de colère. — Fais-moi connaître, demande-t-il, le téméraire, car, par sainte Marie, il périra !

— Ses armes brillaient à la clarté de la flamme, répond William ; son panache était écarlate et bleu ; j’ai remarqué sur son écu un lévrier en lesse d’argent, et son cimier était un rameau d’if.

— Tu en as menti, petit page, tu en as menti : le chevalier que tu me désignes a cessé de vivre ; il est enseveli dans son tombeau sous l’arbre d’Eildon.

— J’en atteste le ciel, ô mon noble seigneur ! j’ai entendu prononcer son nom : votre dame l’a appelé sir Richard de Coldinghame.

La pâleur couvrit alors le front du baron. — La tombe est obscure et profonde, dit-il ; le cadavre immobile et glacé… Je ne puis croire ton récit.

Au lieu où la Tweed roule ses flots autour du saint couvent de Melrose, et où l’Eildon descend en pente douce jusqu’à la plaine, il y a trois nuits qu’un ennemi secret a tranché les jours du chevalier de Coldinghame.

Les reflets de la lumière ont abusé tes yeux ; les vents ont trompé ton oreille ; j’entends encore sonner les cloches de Driburgh, et les moines Prémontrés chantent l’hymne des morts pour sir Richard.

Le baron franchit le seuil de la grille ; il se glisse dans l’escalier étroit, et se rend à la plate-forme, où il trouve sa dame entourée des filles qui la servent.

Il remarque qu’elle est triste, et qu’elle porte ses regards tour à tour sur les collines et les vallées ; sur les oncles de la Tweed et les bois de Mertoun dans la riche plaine de Teviot.

— Salut, salut, aimable et tendre châtelaine ! — Salut,