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Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome I, trad Defauconpret, 1830.djvu/242

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236 MARMION.

le courage ; le mot qu’un ignorant prononce au hasard confond le plus sage, et l’esprit d’un vil esclave suffit pour faire baisser les yeux aux princes les plus fiers.

XV.

Le trouble de Marmion n’était pas sans motif. C’était lui qui avait livré Constance, non qu’il crût que la tombe dût se fermer sur sa victime : mais fatigué du désespoir d’une amante négligée qui passait tour à tour des prières aux reproches ; indigné de son attentat sur la vie de Clara, c’était Marmion lui-même qui avait rendu sa fugitive à l’Église, ne prévoyant pas le sort qu’on lui préparait ; mais espérant qu’on lui ferait expier ses torts dans un cloître lointain. Pour lui, favori de Henry VIII, il craignait peu les foudres de Rome ; il savait qu’à ce tribunal l’or justifie les criminels. Marmion lui-même avait introduit secrètement les prêtres qui vinrent s’emparer de la victime. Ses gens crurent que leur seigneur laissait son page favori à cause de sa jeunesse ; ou si quelqu’un avait conçu des soupçons, il se gardait bien d’en parler. Malheur à l’imprudent vassal qui eût osé se mêler des secrets du maître

XVI.

Jusqu’à présent sa conscience s’était assoupie. Il pensait que Constance resterait en sûreté dans le cloître ; mais sa romance chérie et l’étrange prophétie du pèlerin furent comme un présage sinistre qui réveilla ses remords, et qui lui rappela maints exemples de la vengeance monacale. Constance trahie et abandonnée se représente à son esprit, belle et tendre comme au jour où, vaincue par ses séductions, elle s’échappa, pour le suivre, du séjour paisible du couvent. Il croit la voir dans tous ses attraits, rougissant de pudeur, muette, hésitant entre le ciel et son cœur, jusqu’à ce que l’amour, triomphant de ses alarmes, lui fit cacher ses terreurs et sa honte dans les bras de Marmion.

CHANT TROISIÈME. 237

XVII.