Page:Oeuvres de Walter Scott,Tome II, trad Defauconpret, 1831.djvu/72

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icaire qui lui fait la loi, et son cœur troublé flotte entre la haine et la joie, les remords et la crainte. Charmé de voir partir Bertram, il regrette la riche récompense que réclame le meurtrier ; il maudit son orgueil et son arrogance, et n’ose pas se hasarder avec lui dans le voyage qu’il lui propose. Enfin il se décide pour le parti moyen qu’adoptent toujours la lâcheté et l’astuce. — Sa charge, dit-il, lui défend de s’absenter de la forteresse dans de semblables momens : Wilfrid accompagnera Bertram ; son fils et son ami iront ensemble.

XXIII.

Le mépris modéra la colère de Bertram et changea son sombre coup d’œil en un sourire farouche : Wilfrid ou toi, répondit-il, peu m’importe qui de vous deux me portera la clef d’or ; mais ne crois pas que ta lâche pensée m’échappes : elle me fait sourire de pitié. Si tu crains ma terrible main, Oswald Wycliffe, qui te protège ici contre elle ? J’ai franchi des remparts plus élevés que les tiens, j’ai traversé à la nage des fleuves plus larges que la Tees : ne puis-je pas te poignarder avant qu’un seul cri ait averti la sentinelle ?…. Cesse de trembler : ce n’est point là mon dessein ; mais si ce l’était, tu n’aurais à m’opposer qu’une faible défense ; tu peux m’en croire cette main au besoin a frappé des coups plus hardis. Va réveiller ton fils. Le temps presse : je devrais être déjà loin.

XXIV.

Aucune des noirceurs d’Oswald ne souillait le cœur du jeune Wilfrid : son cœur était trop tendre pour être propre aux hasards périlleux de la fortune. Lorsqu’une nombreuse famille et des fils plus farouches faisaient l’orgueil d’Oswald, le châtelain raillait souvent l’âme faible et la main timide de Wilfrid ; mais la tendresse et le bonheur de sa mère consolaient ce faible enfant. Aucun de ces caprices qui caractérisent l’enfance n’annonçait en lui le courage ; il aimait à étudier les riches écrits de Shakespeare, mais il laissait les tableaux guerriers et la descr