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XXII

J’ai déjà eu occasion de faire intervenir ici les Mémoires du pèlerin bouddhiste Hiouen-thsang. Nous savons ce qu’il est : Chinois et bouddhiste fervent, il a voulu connaître autant que possible tous les lieux illustrés par la présence ou le souvenir du Bouddha, et, dans un voyage qui n’a pas duré moins de quatorze années, il a visité une grande partie de l’Inde, le Kachmir, le Gandhara et autres contrées. Chemin faisant, il s’est enquis des mœurs et de l’histoire des peuples qu’il visitait.

Je trouve dans ses Mémoires le récit dont le texte va suivre et qui, nous le verrons, se rattache directement à la question ici posée :

« Jadis, dit Hiouen-thsang, lorsque le roi Kia-ni-se-kia (Kanichka) était sur le trône (de Kachmir), les royaumes voisins étaient émus de sa renommée, et la terreur de ses armes s’étendait jusque chez les peuples étrangers. Les princes tributaires établis à l’ouest du fleuve (Jaune) redoutaient sa puissance et lui envoyaient des otages. Lorsque Kia-ni-se-kia (Kanichka) avait obtenu ces otages, il les comblait d’attentions et de faveurs. Dans trois des saisons de l’année, il les faisait changer d’habitation et leur donnait quatre corps de troupe pour les protéger. Ce royaume était la résidence des otages (chinois) pendant l’hiver. C’est pourquoi on l’appela Tchi-na-po-ti (Tchinapati). Par suite de cette circonstance, le nom de la résidence des otages devint celui du royaume.

« Anciennement, depuis les frontières de ce pays jusque dans les Indes, il n’existait ni poiriers ni pêchers ; les otages (de la Chine) en ayant planté dans ce royaume, le pêcher fut appelé Tchi-na-ni (Tchînani, apporté de Chine) et le poirier, Tchi-na-lo-che-fo-ta-lo (Tchînarâdjapouttra, fils du roi de Chine). C’est pour cette raison que les habitants de ce royaume montrent un profond respect pour le pays oriental (la Chine).