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ghiz-khan : « Les Mogols, qui regardent Genghis-khan comme leur plus grand prince, lui donnent une origine miraculeuse. Ils prétendent qu’un de leurs anciens khans, nommé Julduz, eut deux enfants qui moururent avant lui. L’un laissa un fils appelé Dejun-baïan et l’autre une fille nommée Alancava. On les maria ensemble. Dejun-baïan qui survécut peu à son grand-père Julduz, laissa Alancava veuve avec deux enfants, le premier, nommé Belgadei, âgé de sept ans ; le second, appelé Begdsadei, âgé de six ans. Alancava, occupée du soin de les élever, ne voulut pas se remarier. Mais on rapporte que quelque temps après, en s’éveillant un jour, elle vit dans sa chambre une grande lumière qui se changea en la figure d’un homme de couleur orangée et qui avoit les yeux d’une beauté parfaite ; qu’elle en fut si épouvantée, qu’elle voulut appeler du monde, mais que ses forces lui manquèrent et que cet esprit coucha avec elle. Alancava n’avoit d’abord osé publier cette aventure, dans la crainte qu’on ne crût qu’elle en imposoit, mais l’esprit étant venu plusieurs fois, elle se trouva enceinte, et l’on s’aperçut de sa grossesse. Cet événement fit beaucoup de bruit dans la horde ; pour se justifier, elle dit qu’elle consentoit à être traitée en coupable si elle n’accouchoit pas de trois enfants mâles. En effet, elle mit au monde trois enfants qui furent nommés : Bocum-catagun, Boskin-saldgi et Bouzendgir ; on les appela tous les trois : les Nouranioun, c’est-à-dire les Illuminés, parce qu’on les regarda comme fils du Soleil. C’est du dernier que descend Genghis-khan[1]. »

Oh ! premier ou dernier, le numéro ne fait ici rien à la chose, et quoi qu’ait dit ou fait dire Tchinghiz-khan du coup de soleil indiscret, qui pénétra itérativement sa grand’mère, il est certain qu’il sort d’une lignée entachée de bâtardise, et M. Girard de Rialle m’accordera galamment, je pense, que je suis en droit de récuser son prétendu étalon pur sang.

Cette autre mésaventure ethnographique de notre savant

  1. De Guignes, Histoire générale des Huns, t. III, liv. xv, p. 9.