Page:Omont - Athènes au XVIIe siècle, 1901.djvu/23

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
17
ATHÈNES AU XVIIe SIÈCLE

libéralités que je ne sçay où trouver des remercimens qui correspondent aux grâces que je reçois. J’aurois esté surpris de vostre magnificence, si je n’estois desjà accoustumé à en ressentir les effects. Je garde tousjours ce que vous me fistes la faveur de m’envoyer à Constantinople. Mais il faut advouer que vostre dernier présent a eu un effect admirable, et que vous estes un médecin qui a des secrets pour guérir les absens sans user de poudre de sympathie. J’avois esté plus de 2 mois malade, lorsque je receus les livres qu’il vous a pleu m’envoyer, et en les voyant j’eus une telle consolation que je commençay à me mieux porter ; mais quand je leus le verset que vostre antagoniste adresse à M. le Dauphin[1], il me vint une envie de rire si grande qu’elle me guérit. Ainsi vous m’avez envoyé un excellent remède, et plus efficace que tous ceux des médecins de cette ville. Maintenant qu’il me faut vaquer aux prédications du caresme, je n’ay peu lire que la critique et sa réponse, que je reliray à loisir avec les autres livres après Pasques. J’ay aussi employé 2 ou 3 heures à lire quelques feuillets du Roman d’Athènes[2], et, en si peu que j’en ay leu, j’ay trouvé quantité de fautes que je vous envois comme de nouvelles armes, s’il vous attaque derechef ; ce que je ne crois pas qu’il fasse après ce que vous et M. Galland luy avez expliqué fort doctement. Il s’amuse à vous censurer sur des bagatelles, c’est un signe qu’il n’avoit rien de solide à vous objecter. La modestie, dont vostre réponse est accompagnée, faict voir la bonté de vostre cause, et je me persuade que tous les gens de bon sens, indignez des paroles outrageuses qu’il vous dit sans en avoir le moindre sujet, quitteront son parti. Ainsi, pensant vous nuire, il a faict tort à sa propre réputation et s’est exposé à la risée des personnes judicieuses, dont vous recevez l’approbation dès le commencement de vostre livre par cette lettre subtile, ingénieuse et élégante que vous addressez à M. le Dauphin.

  1. Allusion au début de la dédicace au Dauphin des Lettres de Guillet : « In te, Domine, speravi, non confundar in æternum. » (Psxxx).
  2. Autre allusion à l’Athènes ancienne et nouvelle de Guillet.