Page:Oncken - Œuvres économiques et philosophiques de F. Quesnay.djvu/48

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sieurs, quel devoir pour mon cœur de vous répéter qu’il nous quitte et que son finie même nous défend d’en être découragés. mon ami sévère et sûr, témoin de ma docilité, garant de mon honnêteté, ô mon conseil, ô mon guide, qui désormais, dans les occasions majeures, rangera mes idées, m’enseignera, par son exemple, la patience et la résignation ? Ô mon maître, combien je vous ai dérobé, et combien pauvre et dénué je me trouve ; et vous me laissez le chef en quelque sorte, ou du moins l’ancien de vos enfants désolés : viennent donc les vents et les orages pour nous rendre, par la nécessité, l’action et le courage qu’il est impossible de n’avoir pas perdus… Mais où m’emporte une douleur indigne de son sujet ; ce n’est point par des pleurs qu’on honore la mémoire des grands hommes : toute faiblesse est bannie de leur culte ; leur âme héroïque (et colle-là surtout) dédaigna toujours tout autre hommage que les efforts qu’on fait pour les imiter. Ne nous occupons plus. Messieurs, que de cette tâche plus méritoire encore que pénible, et renouvelons, dans ce moment d’angoisse et de tendresse, le serment intérieur que nous fîmes de consacrer nos travaux à l’instruction de nos semblables et au développement de la science, qui doit un jour rendre les sociétés paisibles et prospères et les hommes raisonnables et vertueux.

Buste vénérable qui nous représente les traits de notre commun maître, l’image du père vigilant et tendre que nous avons tous perdu, c’est devant toi, c’est sur l’autel élevé à la charité domestique que nous jurons d’être à jamais fidèles au vœu de la fraternité universelle que notre conscience, éclairée par les leçons de l’homme excellent que tu nous retraces, nous lit prononcer. mon maître qui nous entends, ne fallut-il qu’étendre et perpétuer à jamais ta mémoire, notre zèle tendre ne trouverait rien de difficile, rien de rebutant ; mais tu te ranimerais pour repousser la louange si elle devait être stérile. Vouloir le bien, connaître le bien, faire le bien, éclairer, instruire et ramener l’ordre, voilà le seul hommage digne de t’être offert ; ce sera le culte de notre vie entière : daigne en recevoir le serment solennel et l’offrir à l’auteur de tout bien et de toute vertu auquel tu rapportes maintenant tout le profit qu’ont fait et que feront les talents qu’il te donna à faire valoir dans ta carrière. Daigne, daigne, du haut des cieux, sourire encore à nos travaux et à nos larmes, tandis que ma main tremblante t’offre sur la terre les prémices du laurier qui s’élèvera sur ta tombe et qui ne périra jamais !