Page:Oncken - Œuvres économiques et philosophiques de F. Quesnay.djvu/66

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Cette dernière grâce du roi avait été précédée par une autre d’un genre tout différent : le roi lui avait accordé des lettrées de noblesse, et ce prince, qui l’appelait souvent le penseur, lui donna lui-même pour armes trois fleurs de pensée, avec cette devise : Propter cogitationem mentis[1].

  1. Quesnay a, pour la première fois, ajouté le titre d’„écuyer“ sur son „Traité des fièvres continues“, „l’ouvrage le plus intéressant peut-être qui sortit de sa plume“ (Fouchy, page 34), paru en 1753. Ce titre est donc en connexité avec ses autres avancements. Ceux-ci ont été la récompense de ce que Quesnay a sauvé le dauphin atteint de la petite vérole en 1752. L’anoblissement de Quesnay et la qualification de „penseur“ qui lui a été donnée de la part du roi sont d’autant moins dus aux travaux économiques du créateur de la physiocratie, que son premier traité économique (article „Fermiers“ de l’Encyclopédie) ne date que de 1756. Il est hors de doute que la marquise de Pompadour, qui était alors au plus haut degré de sa puissance, ait concouru d’une manière décisive à tous ces bienfaits. Un document lui attribue même directement à ce sujet une action qui sans cela est attribuée au roi. Dans l’ouvrage de Capefigue, Madame la marquise de Pompadour, Paris 1858, p. 262, on lit : „Madame de Pompadour avait dessiné ses armoiries (celles de Quesnay) comme elle l’avait fait pour le comte de Buffon. Les armoiries consistaient en trois feuilles de pensée avec cette devise : „Propter cogitationem mentis“. Ceci concorde mieux avec les renseignements que nous avons sur la position de Quesnay vis-à-vis du roi et vis-à-vis de la Pompadour que les données de Fouchy qui cependant sont encore soutenues par d’Albon et Romance de Mesmon.

    Quoiqu’il en soit, celui qui avait été subitement comblé de bienfaits s’est senti profondément obligé envers la Pompadour. Sinon il lui aurait difficilement dédié son „Traité des fièvres continues“, publié peu après (1753) et dont nous communiquons ici la dédicace assez humble :

    „À madame de Pompadour.
    Madame,

    L’estime que Vous faites des talents et le soin que Vous avez d’attirer sur eux ces regards puissants qui font leur gloire et leur récompense. Vous donnent un droit légitime aux hommages de tous ceux qui cultivent les sciences et les arts. Celui que je Vous rends aujourd’hui Vous appartient à des titres plus particuliers. La confiance dont Vous m’honorez, Madame, me donne un avantage sur tous ceux qui, comme moi, Vous adressent leurs respects. Elle me met à portée de voir chaque jour le principe même de ces sentiments généreux dont les autres ne ressentent que les effets. Oui, Madame, j’admire sans cesse cette bonté d’âme qui s’étend à tous et qui met tant d’attention à saisir les instants de faire le bien, et tant de soins à en éviter l’éclat. C’est à ce trait qui Vous distingue singulièrement que je consacre mon hommage et le respect infini avec lequel je suis. Madame, Votre très humble et très obéissant serviteur Quesnay.“ A. O.