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un traité des facultés. Le dérangement des facultés de l’âme qui influe sur le corps, engendre plusieurs maladies, et le dérangement des facultés du corps qui influe sur l’âme, en altère les fonctions. Cette matière ne peut donc qu’être utile à discuter, elle est même nécessaire et fait partie de la physiologie ; Quesnay l’a traité en maître. Son chapitre de l’action du corps sur l’âme, et de l’âme sur le corps, est rempli de vérités, de sagacité et de justesse d’esprit. Le reste porte la même empreinte.

Après avoir terminé son travail sur l’Economie animale, Quesnay se trouva naturellement conduit à s’occuper de l’Economie politique. En réfléchissant aux influences des affections de l’âme sur le corps, on ne tarde guère à se convaincre que les hommes ne sauraient avoir une véritable santé s’ils ne sont heureux, et ne peuvent être heureux s’ils ne vivent sous un bon gouvernement.

Quesnay est peut être le seul médecin qui ait pensé à cette espèce d’hygiène[1]; quand il voulut connaître les principes de la science du gouvernement, le premier qui le frappa, fut que les hommes sont des êtres sensibles, puissamment excités par les besoins à chercher des jouissances et à fuir les privations et la douleur. Pour savoir comment multiplier ces jouissances si nécessaires à l’espèce humaine, il fallut remonter à la source des biens qui les procurent. Ce fut alors que Quesnay se rappela les premières occupations de son enfance, et que l’agriculture fixa fort attention avec un intérêt plus vif encore.

Les politiques qui avaient écrit avant lui, comptaient plusieurs sources de richesses, la culture, le commerce, l’industrie. Quesnay reconnut et fit voir que l’agriculture, la pêche et l’exploitation des mines et des carrières, étaient les seules sources des richesses, et que les travaux du commerce et de l’industrie ne consistaient qu’en services, en transports, en fabrications, qui ne donnent que des formes nouvelles à des matières premières, et par la consommation des subsistances préexistantes ; que le salaire de ces travaux n’était que le remboursement nécessaire de leurs frais, l’intérêt des avances qu’ils exigent, l’indemnité des risques qu’ils entraînent, et que le tout n’offrait que des échanges de richesses contre d’autres richesses de valeur égale, au lieu que dans l’agriculture, il y a une production réelle de richesses, de matières premières, de subsistances qui n’existaient point auparavant, dont la valeur surpasse celle des

  1. L’art de guérir par un bon régime. (Note de l’original.)