Page:Oncken - Œuvres économiques et philosophiques de F. Quesnay.djvu/92

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animés d’un amour égal pour le bien, se voyoient, s’aimoient, se communiquoient leurs idées ; et sans doute on eut pu beaucoup attendre de la réunion de leur éclat et de leurs lumieres. Tous deux ont l’avantage d’avoir formé des élèves d’un mérite distingué, qui ont beaucoup contribués [sic] à répandre des lumieres utiles. Ils ne prévoyoient pas qu’on chercheroit un jour à les opposer l’un à l’autre ; leur cœur fraternel s’en seroit indigné. “Quand on parle pour la justice et la raison, disoit souvent Quesnay, on a bien plus d’amis qu’on ne croit. Il y a d’un bout du monde à l’autre une confédération tacite entre tous ceux que la nature a doués d’un bon esprit et d’un bon cœur. Pour peu qu’un homme qui expose le vrai, en rencontre un autre qui le comprenne, leurs forces se décuplent. C’est avec la vérité qu’un et un font onze, et s’il s’y en joint encore un, cela vaut cent onze”.

Puisse cet esprit d’union et de confiance réciproque s’établir en effet entre tous les défenseurs de l’humanité si long-temps opprimée ! Leur nombre est-il si grand qu’il faille les diviser encore ? … O MES AMIS ! bannissés ces qualifications isolantes qui réfroidissent et aigrissent les cœurs. Ne donnez ni n’acceptez ces noms de Sectes, qui séparent ou aliénent les esprits. Quiconque aime la patrie etl’humanité, ne doit-il pas regarder comme des freres, ceux qu’un même sentiment embrase à quelque foyer qu’ils l’aient allumés ? Quiconque aime l’instruction, doit il craindre d’appeller son pere, son frere, son maître, l’homme qui lui enseigne des vérités ?

Personne n’en a reconnu et montré un plus grand nombre que Quesnay, ni sur des sujets plus importants. C’est lui qui a découvert et prouvé que l’impôt sur les consommations, sur le travail, sur le commerce, non-seulement retombe sur les propriétaires des biens fonds, mais y retombe avec une surcharge effrayante, une surcharge non seulement proportionnée aux frais multipliés vexatoires et litigieux qu’il entraîne, mais redoutable, fur-tout par la dégradation de la culture qu’il nécessite. Une partie au moins de cet impôt porte, où [sic] est rejetée sur les avances primitives et annuelles de l’exploitation des terres. Il les détourne de leur emploi fructueux ; il enleve une portion des capitaux qui devroient y être consacrés. Cette puissante cause des récoltes diminuées, les récoltes mêmes s’affaiblissent, les subsistances manquent la population dont elles déterminent la mesure, périt dans le dénuement et l’infortune. Voilà ce qu’a dit et calculé Quesnay : voilà ce dont il eut le courage de faire imprimer la démonstration, sous les yeux même et dans le Palais