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Page:Opuscules de Saint Thomas d’Aquin, tome 2, 1857.djvu/274

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il est en lui d’être dans la matière; autrement il serait, par accident, un composé de matière et de forme. Mais rien ne peut exister sans ce qui est en soi; donc la forme d’un corps ne peut être dans le corps. Si donc le corps est corruptible, il s’ensuivrait que la forme du corps devrait être corruptible.

De plus, les formes séparées de la matière, et les formes qui sont dans la matière, ne sont pas les mêmes en espèce, comme il le prouve dans le septième livre de sa Métaphysique. À plus forte raison, une seule et même forme ne peut être à la fois sans le corps et dans le corps. Après la décomposition du corps, la forme du corps est détruite, ou elle passe à un autre corps. Si donc l’intellect est la forme du corps, il s’ensuit de toute nécessité que l’intellect est corruptible. Cette considération a fait impression sur l’esprit de plusieurs. Car saint Grégoire de Nysse veut qu’Aristote pensât que l’âme est corruptible, parce qu’il disait qu’elle était la forme du corps. Quelques autres, au contraire ont pensé qu’elle passait d’un corps à un autre; d’autres qu’elle avait un corps corruptible duquel elle ne devait jamais être séparée. C’est pourquoi il nous faut prouver, par les paroles d’Aristote, qu’il pensait que l’âme intellective était la forme du corps, et pourtant incorruptible. Car, après avoir démontré dans le onzième livre de sa Métaphysique, que les formes ne sont pas antérieures à la matière, parce que quand un homme a recouvré la santé, il y a la santé en lui, et la forme d’une houle d’airain est avec la forme de l’airain: il demande en conséquence, si une forme reste après la matière, et il parle ainsi dans le sens de Boèce. li faut donc examiner si quelque chose reste après la matière. Car rien n’empêche qu’il en soit ainsi dans certains cas, par exemple l’âme, non tout entière, mais quant à l’intellect;