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Page:Opuscules de Saint Thomas d’Aquin, tome 2, 1857.djvu/316

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elle-même: Car la perfection d’une chose consiste à être non seulement bonne en soi, mais encore à communiquer ses qualités aux autres. Or on ne soit pas comment les substances séparées communiquent la bonté aux êtres qui leur sont inférieurs, si ce n’est par le mouvement de certains corps; aussi c’est de là qu’Aristote déduit une espèce de probabilité qu’il n’y a d’autres substances séparées que celles que l’on connaît par les mouvements des corps célestes, bien que ceci ne soit pas nécessaire, comme il l’avoue lui-même.

Nous avouons que l’âme humaine séparée du corps n’a pas sa dernière perfection, puisqu’elle est une partie de la nature humaine. Car la partie n’est pas parfaite tant qu’elle est séparée du tout. Mais elle n’est pas inutile pour cela, parce que la fin de l’âme humaine n’est pas d’animer les corps, mais sa fin est l’intelligence, en laquelle consiste sa félicité, comme Aristote le prouve dans le dixième livre de sa Morale. Nos adversaires veulent appuyer leur erreur en disant que s’il y avait plusieurs intellects pour plusieurs hommes, comme l’intellect est incorruptible, il s’ensuivrait qu’il y en aurait une infinité, puisque, d’après l’opinion d’Aristote, le monde est éternel, et qu’il y a toujours eu des hommes. Algazel répond ainsi dans sa Métaphysique: "Que dans ces deux cas, ce qui aura été sans l’autre, c’est-à-dire la quantité ou le nombre sans ordre, ne peut être sans l’infinité, comme le mouvement du ciel." Il ajoute encore: "Nous convenons également que les âmes humaines, qui sont susceptibles d’être séparées des corps, sont infinies en nombre, quoiqu’elles aient l’être simultanément, parce qu’il n’y a pas entre elles d’ordre naturel, en dehors duquel elles cessent d’être des âmes, parce qu’il h’y en a aucune qui soit le principe des autres, puisqu’elles n’ont entre elles ni