Page:Oraison funèbre de très haute et puissante Dame, Madame Justine Pâris, 1884.djvu/44

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Je n’y trouvai rien d’extraordinaire qu’un fauteuil, dont la forme singulière me frappa.

« Asseyez-vous dedans, — me dit mon ami ; vous allez concevoir son utilité. »

À peine je m’y fus jeté que le mouvement de mon corps fit jouer une bascule. Le dos se renversa, et moi aussi.

Je me trouvai subitement étendu sur une espèce de lit de repos ; les jambes et les bras entièrement écartés des deux côtés de cet abominable fauteuil, et mollement retenus par de solides bandelettes, me laissaient complètement à la merci de chacun.

« Ma foi, répondis-je, les filets du Dieu de Lemnos ne valaient pas mieux. »

Mon très louable guide m’apprit que ceux-ci se nommaient les filets de Fronsac ; qu’ils avaient été imaginés par ce Seigneur, digne fils de son père, pour triompher d’une pucelle qui, quoique d’un rang très médiocre (c’était la nièce d’un savetier) avait résisté à toutes ses séductions, à tout son or et à toutes ses menaces.

Ce Fronsac, Duc et Pair de France, devenu furieux d’amour, se porta à commettre trois crimes à la fois pour assouvir sa passion ; il se rendit coupable d’incendie, de rapt et de viol.

Une belle nuit, il fait mettre le feu à la maison de cette jeune fille par des coupe-jarrets à ses ordres.

Une vieille Duègne, profitant du désordre qu’occasionna cet accident, s’empare de la fille, sous prétexte de lui donner un asile, et, l’ayant soustraite aux yeux de sa mère, la conduit dans ce repaire.