Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/156

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

disparaît dans un nuage, il n’est pas perdu pour le monde. Il sort de temps à autre dans tout l’éclat de sa gloire et marche vers la demeure éloignée des ennemis. Sa renommée est venue, pareille au bruit des vents, à la vallée boisée de Cluba.

La tristesse habite dans Cluba des harpes : la race des rois est absente : dans les combats est mon père Conmor et Lorman, mon frère, roi des torrents. Mais ils ne sont pas seuls : près d’eux est un rayon venu des autres terres, l’ami des étrangers dans Atha, le dévastateur des champs de bataille. Du haut de leurs brumeuses collines, les yeux bleus d’Érin[1] regardent au loin, car il est loin, bien loin, le jeune habitant de leurs âmes ! Blanches mains d’Érin, redoutable est Cathmor dans les ailes de la bataille ! Dix mille guerriers marchent devant lui, sur une plaine éloignée !

« Ossian, répondis-je, a vu Cathmor s’élancer de ses torrents, lorsqu’il versa sa force sur I-thorno, l’île des vagues nombreuses ! Dans I-thorno combattirent deux rois, Culgorm et Suran-dronlo : sauvages chasseurs du sanglier, chacun d’eux était venu de sa colline retentissante. »

« Ils rencontrèrent un sanglier près d’un torrent écumant ; chacun d’eux le perça de sa lance. Ils se disputèrent la gloire de cette action, et une guerre terrible s’éleva. D’île en île ils envoyèrent une lance rompue et teinte de sang, pour appeler aux armes les amis de leurs pères. Cathmor vint d’Érin vers Culgorm, le roi aux yeux enflammés : je secourus Suran-dronlo dans sa terre des sangliers. »

« Nous descendîmes sur les deux rives d’un torrent qui rugissait à travers une lande dévastée. Des rochers escarpés et brisés étaient à l’entour, avec tous leurs arbres inclinés. Près de là étaient deux

  1. « Les yeux bleus d’Érin » pour les jeunes filles d’Érin.