Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/232

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dans le champ des combats. Je ne dirigerai plus ton javelot. Tu étais si beau ! Je ne te vois plus ! Adieu ! »

Des pleurs sont sur la joue du roi, car son fils était terrible dans la guerre ; son fils qui ressemblait à un rayon de feu, la nuit, sur la montagne, quand les forêts tombent sous son passage, et que le voyageur tremble au bruit de leur chute : mais les vents l’emportent au delà des rocs escarpés ; il disparaît à la vue et les ténèbres triomphent.

« Quel est celui dont la gloire est dans cette verte tombe ? dit le roi des coupes généreuses. Quatre pierres, avec leurs têtes de mousse, marquent l’étroite maison de la mort. Près de là, que Ryno repose ; qu’il dorme voisin des braves ! Peut-être gît ici quelque chef renommé, qui s’envolera avec mon fils sur les nuages. Ô Ullin, dis les chants du passé : réveille leur mémoire ensevelie dans leur tombe. S’ils n’ont jamais fui dans le champ des batailles, mon fils reposera près d’eux ; il reposera, loin de Morven, sur les plaines de Lena. »

Ici, dit le barde harmonieux, ici reposent les premiers des héros. Silencieux est Lamderg dans cette tombe, muet est Ullin[1], le roi des épées. Mais quelle est celle qui, douce et souriant sur son nuage, me montre son visage d’amour ? Pourquoi, vierge, pourquoi es-tu si pâle, toi la première des filles de Cromla ? Ne dors-tu point avec les ennemis, blanche fille de Tuathal ? Tu fus l’amour de mille guerriers ; mais Lamderg fut ton seul amour. Il vint vers les tours moussues de Tura, et, frappant son noir bouclier, il dit : « Où est Gelchossa mon amour, la fille du noble Tuathal ? Je l’ai laissée dans le palais de Tura quand j’allai combattre le puissant Ulfada. « Reviens bientôt, ô Lamderg, me dit-elle, car je

  1. Ullin, fils de Cairbar qu’il ne faut pas confondre avec le barde de ce nom.