Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/378

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sur les roseaux du lac de Lego, quand le sommeil descend à moitié sur le chasseur couché sur la mousse de sa caverne.

« Pourquoi, dit FingaI, le barde de Cona se penche-t-il en silence aux bords de son torrent. Est-ce ici le temps de la tristesse, ô père d’Oscar qui n’est plus ! Que le souvenir des guerriers ne revienne qu’avec la paix et lorsqu’on n’entend plus le bruit des boucliers ! Dans ta tristesse, penche-toi alors sur le torrent où souffle la brise de la montagne ; et que les habitants de la tombe, les ombres aux yeux bleus, passent alors sur ton âme ! Mais Érin aujourd’hui roule au combat ses flots vastes, sombres et courroucés. Lève, Ossian, lève le bouclier : je suis seul, ô mon fils ! »

Comme à la voix subite des vents, le navire, retenu par le calme dans la baie d’Inis-huna, vole au large et chevauche les flots noirs de l’abîme ; ainsi, à la voix de Fingal, Ossian, majestueux, s’élance sur la bruyère.

Il lève, dans l’aile sombre de la guerre, son bouclier brillant, semblable à la lune large et pâle, dans les plis d’un nuage, avant que la tempête s’éveille.

Du Mora, que couvre la mousse, descend à grand bruit la guerre aux vastes ailes. Fingal, roi des torrents de Morven, conduit son peuple au combat. Son aile d’aigle se balance dans l’air et ses cheveux blancs flottent sur ses larges épaules. Sa marche puissante retentit comme le tonnerre. Souvent il s’arrête et regarde rouler derrière lui les vastes flots des brillantes armures. Il ressemble au rocher que la glace a blanchi et dont les bois s’élèvent dans les vents ; des torrents brillants jaillissent de son front et répandent leur écume dans les airs.

Fingal arrive à la caverne où Fillan dort son noir sommeil. Bran est encore couché sur le bouclier brisé : l’aile d’aigle est dispersée par le vent ; bril-