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DE L’AUTHENTICITÉ

est comprimée ou méconnue, et peut à peine se soutenir au-dessus de la médiocrité : alors rhapsodes, bardes, trouvères, s’en vont déclamant de froides mélopées dont la tradition daignera tout au plus conserver des fragments. Mais ces fragments, qu’un grand poète se lève et il s’en emparera ! Ce seront ses matériaux pour ériger un monument que l’avenir admirera et nommera d’un grand nom générique.

Ce n’est là qu’une pure hypothèse à propos d’Ossian, mais peut-être n’est-elle pas loin de la vérité. Ne point reconnaître de transition entre un grand homme et ceux qui l’ont précédé, en faire un être à part, isolé, exclusif, un Dieu enfin ! c’est admettre qu’il est des époques de mort et de résurrection pour la poésie : ce qui n’est pas, ce qui ne peut être, car la poésie ne meurt jamais ! Il est des temps où elle se déplace, il est des temps où elle sommeille, mais elle vit toujours, mais elle ne s’éteindra qu’avec l’humanité, car sa vie à elle, c’est le cœur même de l’homme, c’est la création tout entière. Oui ! comme l’électricité dans l’air, la poésie est partout dans la nature et dans l’homme ; toute chose créée contient en soi une parcelle plus ou moins grande de cette émanation céleste : mais qu’il surgisse