Page:Ossian - Œuvres complètes, 1842, trad. Lacaussade.djvu/83

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
27
CARRIC-THURA.

vivra dans sa louange. Souviens-toi de moi, Vinvela, quand je serai couché dans la terre !

VINVELA.

Oui, je me souviendrai de toi ! Hélas ! mon Shilric succombera ! Que ferai-je, mon amour, quand tu seras parti pour toujours ? Sur ces collines j’errerai à midi ; j’irai sur cette bruyère silencieuse. Là, je verrai la place de ton repos, quand tu revenais de la chasse. Hélas ! mon Shilric succombera ; mais je me souviendrai de Shilric ! »

« Et je me rappelle ce chef, dit le roi de Morven ; dans sa rage il consumait la bataille. Mais maintenant mes yeux ne l’aperçoivent plus. Je le rencontrai un jour sur la colline ; sa joue était pâle, son front sombre ; de fréquents soupirs sortaient de sa poitrine et ses pas étaient vers le désert. Il n’est plus dans la foule de mes chefs, quand s’élève les sons de mon bouclier. Demeure-t-il dans l’étroite maison des morts, le chef de la haute Carmora ? »

« Cronnan, reprit Ullin, dis-nous le chant de Shilric, quand il revint sur ses collines et que Vinvela n’était plus. Il pensait qu’elle vivait encore et s’appuyait sur sa pierre grisâtre et couverte de mousse. Il la voyait errer gracieuse sur la plaine ; mais la forme brillante ne dura pas long-temps : le rayon du soleil s’évanouit de la plaine et il ne la vit plus. Écoutez le chant de Shilric ; il est doux mais triste !

SHILRIC.

Je suis assis sur la mousse de la fontaine, sur le sommet de la colline des vents. Un arbre frémit au-dessus de moi ; des ondes sombres roulent sur la bruyère et plus bas le lac est troublé. Le chevreuil descend de la colline ; on ne voit aucun chasseur dans le lointain. C’est le milieu du jour, mais tout est silencieux. Je suis seul et mes pensées sont tris-