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CARRIC-THURA

douce et vibrante : le chant fut agréable mais triste, et le silence était dans Carric-thura.

L’automne est sombre sur les montagnes ; une brume grise repose sur les collines. On entend sur la bruyère tourbillonner le vent. La rivière roule sombre à travers la plaine étroite. Un arbre solitaire indique sur la colline la place où repose Connal. Les feuilles tourbillonnent à la brise et la tombe du héros en est jonchée. De temps à autre les ombres de ceux qui sont partis apparaissent en ce lieu, à l’heure où le chasseur pensif se promène seul et à pas lents sur la bruyère. Qui peut remonter à la source de ta race, ô Connal ? qui peut raconter l’histoire de tes pères ? Ta famille croissait comme un chêne sur la montagne, un chêne qui oppose aux vents sa tête altière. Mais aujourd’hui ce chêne est arraché de la terre. Qui prendra la place de Connal ? Ici furent entendus le choc des armes et les gémissements des mourants. Sanglantes, ô Connal, sont les guerres de Fingal ! C’est ici que tu tombas. Ton bras était pareil à la tempête ; ton épée au trait de feu du ciel ; ta stature au rocher sur la plaine ; tes yeux à une fournaise ardente. Plus forte que la tempête était ta voix dans les combats ! Les guerriers tombaient sous ton épée comme le chardon sous le bâton d’un enfant. Le puissant Dargo s’avança, sombre dans sa fureur ; ses sourcils se fronçaient avec rage et ses yeux étaient comme deux antres dans un rocher. Brillantes se levèrent leurs épées ; terrible fut le choc de leurs armes !

Près d’eux, la fille de Rinval, Crimora, brillait, sous l’armure d’un guerrier. Sa chevelure blonde flotte derrière elle ; son arc est dans sa main. Elle avait suivi à la guerre le jeune Connal, son bien-aimé. Elle banda son arc contre Dargo ; mais, se trompant, elle perça Connal. Il tombe comme un chêne sur la plaine, comme un rocher du front chevelu de