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tions logiques, mystiques, juridiques, biologiques, proposées aux peuples par les plus grands génies.


La sociologie allemande.[1] — On ne saurait comprendre les tendances réalistes de l’Allemagne en sociologie qu’à la lumière de son histoire, car les effets de la Réforme, de l’Aufklärung, aussi bien que du développement du capitalisme, y ont produit des résultats bien différents de ceux de l’Europe occidentale. Peut être que le plus important a été la survivance en Allemagne de certains restes du système féodal, qui engendre une armée de bureaucrates et de professionnels qui ne furent pas des « libéraux », mais des soutiens et des dévoués de l’Etat. C’est à ce fait entre autres que l’on doit la puissance toute particulière du Romantisme en Allemagne. La science nouvelle de la sociologie y prit naissance dans un certain processus dialectique : l’Aufklärung étant la thèse, la contre-révolution intellectuelle exemplifiée par le romantisme, l’antithèse et la sociologie une tentative de synthèse. Sur ce point il y eut divergence entre la pensée de l’occident et celle du centre de l’Europe. La pensée de Stein, par exemple, fut un produit de ces fécondations croisées des cultures et aussi celle de Marx. Celui-ci retourna la doctrine de Hegel. Pour lui la conscience ne détermine pas l’être, mais l’être détermine la conscience : première approche de la doctrine moderne, du déterminisme socio-psychologique. Comme un résultat des courants opposés auxquels la sociologie allemande a été exposée, elle a pris plus de soins que d’autres écoles en posant les fondements philosophiques et en particulier elle s’est gardée d’accepter trop vite et trop complètement les méthodes des sciences naturelles, méthodes qui maintenant dominent beaucoup la sociologie occidentale. Dilthey, Rickert et Husserl ont traité avec profondeur ces problèmes. En dépit et peut être à cause de leur profondeur, le

  1. Franz Oppenheimer. Tendencies in recent German Sociology. Sociol. Rev. 1932, Jan., 1-13 ; July, 125-137.

    Karl Mannheim. La sociologie allemande de 1918 à 1933. Tierra Firme 1935, n° 1.